Filière déchets : valoriser ses métiers

Publié le : 17/09/2015

Ce site de production aquitain (35) salariés appartient à une grande entreprise dans le secteur du traitement des déchets issus du tri sélectif.
Il assure la réception, le tri et le conditionnement des déchets collectés chez les particuliers et les entreprises locales.

L'activité est répartie entre :

  • réception des produits,
  • tri manuel,
  • conditionnement des produits valorisés,
  • chargement des camions,
  • gestion administrative du transport.

La majeure partie du personnel est affectée à une activité de tri manuel organisée en équipe sur une ligne d'approvisionnement. Le métier d'opérateur de tri est un métier dit "non qualifié" et les compétences spécifiques à cette activité sont mal identifiées par les recruteurs.

Cette étude, réalisée par l’Aract Nouvelle-Aquitaine, a pour objectif de mieux comprendre les contraintes techniques et organisationnelles du process du tri déchet et les évolutions des métiers de la filière déchet. Une alerte sur les conditions de travail et un questionnement sur l'usure et la pénibilité de ces postes sont en cours de réflexion au niveau de l’entreprise, dans le cadre d’un projet sur la filière déchet. L'Aract a proposé d'analyser ces postes de tri pour identifier des compétences spécifiques à ces postes, afin de repérer les évolutions possibles en termes de parcours professionnel et de métier pour les opérateurs de tri. De son coté l'entreprise a un projet de modernisation du process et souhaite améliorer les conditions de travail à ces postes.

Une étude globale des postes de tri

Pour commencer l'Aract a validé, avec le responsable du site et l'agent Ressources Humaines, l'étude de ces postes de tri (avec la participation du personnel). Ces résultats ont été présentés aux responsables, au délégué du personnel et à l'entreprise relevant de la collectivité territoriale et réalisant la collecte des déchets.
Il était également intéressant d’associer l’entreprise tiers responsable de l'approvisionnement des produits pour mettre en lumière les impacts de la collecte sur le tri des déchets.
L'Aract a réalisé des observations des situations de travail, des entretiens individuels et collectifs. Deux objectifs à cette démarche :

  •  identifier la connaissance des acteurs sur les possibilités d'évolution de métier ou de poste et les pratiques dans l’entreprise,
  • comprendre les déterminants de l'activité de travail et identifier les stratégies et les savoir faire développés par les opérateurs de tri.
    Cette population au travail n’a pas fait le choix de ces postes mais les occupe plutôt à défaut d’autre emploi. Nous voulions donc connaitre comment ces opérateurs peuvent se projeter dans l’évolution des métiers de la filière et s’inscrire dans un processus de formation.

Un métier aux multiples exigences

A travers ces entretiens et ces observations nous avons caractérisé plus précisément ce qui compose l'activité de tri manuel : les exigences physiques et aussi les exigences cognitives. Techniquement, faire du tri sur une ligne de production, c'est repérer visuellement des produits différents, les prendre avec les mains et les envoyer dans les bacs prévus ou les laisser sur le tapis pour le trieur suivant ou par tri négatif.
A partir des observations nous avons ensuite validé avec les opérateurs des modes opératoires particuliers. Par exemple le tri n’est pas uniquement visuel, il est parfois nécessaire de toucher ou d’écouter le bruit que font les plastiques pour les dissocier et respecter une consigne de tri spécifique pour assurer la qualité du tri.
D’autre part une forte problématique de risque professionnel est liée au produit à trier. Certains déchets ne devraient pas être dans les bacs de collecte dédiés au papier, carton, plastique et métaux. Et pourtant les opérateurs font face à ces défauts du tri en amont d’où la volonté d’associer les acteurs de la collecte et du tri à la présentation des résultats. Des stratégies de communication entre les équipes ont été mises en évidence. Par exemple il existe une circulation d’informations liées à la prévention des risques professionnels entre les opérateurs qui réceptionnent les produits entrant et les opérateurs de tri.

De nombreuses compétences mises en œuvre

Nous nous sommes intéressés à l'organisation des équipes et au type de management en vigueur sur ce site. Des dispositifs d'espace de discussion sur les améliorations et sur l'organisation du travail fonctionnent avec le responsable de site. Ces lieux de discussion et d’échanges ont permis aux équipes de s'impliquer dans les propositions d'améliorations du fonctionnement et d'aménagement des postes.
Nous avons relevé des compétences au travail collectif pour tenir les cadences et pallier aux aléas du tri. Les équipes sont en capacité de réguler l’activité de travail et de s’adapter aux évolutions des exigences du tri, en effet la valorisation des produits évolue en fonction du marché des matières.
D’autre part du fait d’un recrutement permanent de nouveaux opérateurs, la formation au poste prévue par l’entreprise ne se fait qu’après une période de travail temporaire avant l’embauche. Il revient donc à certaines personnes d’intégrer les nouveaux sur les postes, ces personnes ont développé des capacités à former et à faire du tutorat. Dans un secteur avec des risques professionnels importants du fait des produits à traiter, les opérateurs ont développé des savoirs faire de prudence qu’ils transmettent aux nouveaux.
Tous ces éléments ont pu être identifiés et analysés à partir des observations et des entretiens. Cette partie d'analyse ergonomique du terrain a été essentielle pour caractériser au mieux le travail et comprendre quelles compétences et quelles stratégies avaient développées les opérateurs.

Cette  étude a rendu visible certaines compétences utilisées par les opérateurs et modifié la représentation de ce travail de tri pour une reconnaissance de qualification spécifique du métier. Les exigences cognitives du tri pour assurer qualité et quantité n’étaient pas repérées au sein de l'entreprise. Pour répondre aux cadences attendues par l’entreprise, les opérateurs ont développé des stratégies de tri et d’organisation,

  • comme la capacité à anticiper le tri,
  • l’organisation de l’espace de travail.


L’analyse de l’activité a mis en évidence :

  • des activités de contrôle qualité,
  • des corrections de défaut de tri.

Tous ces éléments ont permis de donner une vision du métier moins simpliste, pas uniquement manuel, et d’introduire la notion de capacité cognitive. 
"En fait je ne pensais pas que c’était si compliqué de faire ce tri" nous a dit ce DRH. Changer le regard sur ce métier de tri manuel, c’est donner aux opérateurs eux-mêmes comme aux responsables RH des perspectives de formation et d’apprentissage de nouveaux métiers. Dans un contexte général d’évolution de la filière avec des besoins de nouveaux métiers, il est indispensable de réfléchir aux évolutions des métiers dits « non-qualifiés » et avec un fort impact sur la santé pour permettre aux opérateurs d’envisager un parcours professionnel sur différents métiers.
En savoir plus : Laurence Vergneaux, chargée de mission

 

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